lundi 29 octobre 2012

NOUVELLE VERSION DE L´ODYSSÉE D´UN FANTÔME ( Extrait de l´Acte I )



            by Antoine Vumilia on Monday, October 29, 2012 at 11:08am ·

115  Dans les rangs de l'armée, c´est la grande purge. Les  officiers originaires de l´est sont écartés du commandement des troupes. Il ne se passe pas un jour sans que dans la capitale on apprenne la disparition des kadogos par dizaines.
57 Rires. Opération vautour.
115 Oui, opération vautour de triste mémoire.
57 Rires. Je vois bien que cela vous a foutu une trouille. J´étais  le commandant de la ville à l´époque. 8 de nos 11 provinces étaient touchées par la rébellion. Les principales villes minières étaient menacées. Nous n´allions pas rester las bras croisés, tout de même ! Il fallait à tout prix éviter de se faire surprendre à Kinshasa.
115 On n´avait rien à voir avec la rébellion. Nous réclamions un meilleur salaire, la fin des discriminations et des disparitions forcées, voilà ! Je m´étais fait arrêter et intimider une fois sur mon lieu de travail. On me soupçonnait de je ne sais plus quoi. Je ne suis pas le seul à avoir subi ce sort. A cause des disparitions, ceux des kadogos qui habitaient les casernes les ont désertées et ceux qui habitaient en ville se réfugiaient sur les toits des maisons la nuit venue, avec armes et munitions.
89 Les camions couverts de bâche reprennent du service, pour les kadogo, cette fois. Les fosses communes à nouveau ouvrent leurs ventres pour se nourrir de leurs corps jeunes.  Les sous-sols des geôles de la présidence encore baignent dans le sang. Et les poissons du fleuve Congo font ripaille de leurs chairs aux rapides de Kinsuka.
115 Ceux qui le peuvent encore  se regroupent en petites grappes désorganisées. De petites caches d'armes se constituent dans les plafonds de Kinshasa, des projets d'embuscade se concoctent dans le noir. On conspire sans trop savoir comment s'y prendre par la suite, avec  dans la tête pêle-mêle des idées de putsch, de mutinerie ou de révolution, mais surtout un profond sentiment de désillusion et le désir d'en finir vaille que vaille.
57 Vous avez conspiré.
89 C´était la seule façon de respirer.
57 Vous étiez instrumentalisés par Masasu.
89 Le commandant était déjà en prison et n´allait pas tarder à être exécuté.Il n´y était pour rien.
57 Eh bien , il l´aura mérité.
115 Kabila aussi l´aura mérité parce qu´il n´a tenu que 45 jours après la mort du commandant.
57 Donc vous l´avez tué pour venger la mort de votre «  commandant » ?
115 C´est la thèse officielle. Je la trouve trop simple.S´est-on une seule fois posé la question de savoir à qui a profité le crime ?
57 Allons-nous refaire le procès ici ?
115 Puisqu´il y a eu un procès, selon toi ?
89 Et si on parlait d´autre chose ?
115 Nous sommes en train d´écrire une histoire, 89. Tu as oublié ton texte pour ce spectacle ? Où en étions-nous déjà ?
89 À l´opération vautour…
115 C´est la débandade parmi les kadogo. Ceux qui le peuvent traversent le fleuve. Certains se font rattraper. On retrouvera trois jours plus tard leurs corps flottant là-bas au loin, coincés entre les rochers des rapides de Kinsuka, en partie rongés par les poissons du fleuve Congo.
89 C´est  là que  le chien du roi, en entrant en clandestinité, inaugure son destin de fantôme. Tel un fantôme je suis là sans vraiment y être. Tel un fantôme je vois sans pouvoir ëtre vu sauf par des clairvoyants. Tel un fantôme je n´ai pas la paix. Ombre de moi-même, j’erre dans une ville qui ne me reconnait plus, et c´est tant mieux.
115 Je ne peux plus me rendre sur mon lieu de travail sans craindre de me faire arrêter et exécuter. Aussi, ne pas aller au  travail est une…
57 Insubordination, désertion en temps de guerre, fuite devant l´ennemi. Trois fois la peine capitale.
89 Le fantôme va frapper à la porte d´une ONG de défense des droits de l´homme... Je n´en peux plus. Aidez moi. Trouvez-moi une cachette…n´importe où. Faites-moi quitter ce pays, si possible. J´ai une femme et un bébé de sept mois. C´est vrai que ma femme ne veut pas partir. Elle se dit à 100% Congolaise, qu´il n´y a rien à craindre, que les choses vont finir par s´arranger…C´est vrai, mais je pourrais la convaincre. (Un temps) Ah, bon ! Vous pensez que je devrais encore attendre…Je comprends, comme vous le dites, que vous avez une forte demande ces temps-ci. Mais tout de même…
115 Nous cinq soldats, réfugiés dans une petite maison depuis plusieurs jours. Le commandant vient d´être assassiné au Katanga après un simulacre de procès.
57 Inculpé, jugé, condamné et exécuté.
89 En une seule nuit, quand même…Et pourquoi en pleine brousse ?
57 Nous n´osons pas mettre le nez dehors, mais nous pouvons voir passer régulièrement les véhicules de patrouille de l´armée et ceux de la mission des Nations-Unies. Et puis cette idée qui émerge de l´un d´entre nous.
89 Ecoutez les gars. Nous ne pourrons plus tenir longtemps dans cette situation. Si Kabila s´est laissé manipuler par les faucons de son entourage jusqu´à assassiner le commandant, c´est qu´il est  devenu complètement fou. Et la communauté internationale, on ne peut rien en attendre.
ville. Je propose qu´on fasse parler la poudre dans tout Kinshasa. Au moins on entendra parler de nous.
57 Quand il apprend la mort de Masasu, Kabila est triste. Comme s´il regrettait d´avoir écouté mon conseil. Il ne semble toujours pas comprendre que cet homme était devenu un danger pour toute la nation. Pour une fois j´étais d´accord sur quelque chose avec son fils, celui dirigeait la force terrestre. Ah, ce jeune-homme, une vraie peste !
115 Il était ton chef hiérarchique, et tu ne voulais pas lui présenter tes rapports.
57 Je recevais mes ordres directement du père. Je n´en avais rien à faire avec ce soit disant fils. Du reste il s´en dit des choses sur cette paternité !
89 Tu avais la fâcheuse habitude d´être toujours derrière les mêmes filles que lui, voilà le problème.
115 Il rit. Comme la charmante  capitaine docteur Véronique. Tu te rappelles ? Celle qui faisait les massages au président. D´ailleurs je me demande si à un certain moment vous ne vous êtes pas retrouvés dans un ménage à quatre. 89 et 115 rient.
57 Si c´est comme ça que cette histoire va s´écrire, franchement…
89 Il ne faut pas sous-estimer la perspective du jupon et de la braguette quand on veut écrire l´histoire.
57 Vous êtes dans quoi ? Da Vinci Code ?
Et toi 89, c´est quand même curieux que tu aies attendu si longtemps pour qu´en fin tes yeux s´ouvrent sur la nature corrompue d´un régime que tu as servi. Tu as attendu qu´on te touche sur la fibre identitaire, pour croire à toutes les critiques que les jaloux proféraient contre notre chef.
89 Je m´étais mépris dès le départ, en sautant dans un camion qui ne se rendait pas à Goma. De même ce mouvement n´était pas une révolution, mais un montage capitaliste pour contrôler…
57 D´où te vient cette lucidité soudaine.
89 Il faut du temps pour se rendre compte et sortir du somnambulisme pseudo révolutionnaire.
57 Il faut aussi du temps avant de s´engager dans un mouvement.
89 J´étais trop jeune…
57 Lâcheté.
89 Je n´avais pas assez d´information…
57 Mensonge.
89 Non, j´assume le fait que…
57 Eh bien, assume jusqu´au bout ! Un temps. Franchement j´attends que tu me dises qui tu espères faire danser avec une histoire pareille. Tous rient.

vendredi 26 octobre 2012

La fermeture de la frontière entre la RDC et le Rwanda fait des mécontents




Entre 18 heures et 6 heures du matin, les frontières entre le Rwanda et la République démocratique du Congo seront fermées. La mesure du gouverneur de la province du Nord-Kivu est tombée ce 21 octobre sans plus d’explications qu’un simple réaménagement des horaires. Est-ce pour lutter contre l’insécurité ou un signal qui montre que les autorités congolaises contrôlent encore cette partie du pays?

«Les postes frontaliers de la Grande et la Petite barrière ouvriront désormais à 06hoo du matin et fermeront à 18hoo locale», rapporte la Radio Okapi, la radio des Nations unies en République démocratique du Congo ce 23 octobre.
Selon Julien Paluku, gouverneur de la province du Nord-Kivu, cette mesure est prise pour réaménager les horaires d’ouverture et de fermeture des frontières entre Goma (ville congolaise) et Gisenyi (ville rwandaise).

Taximen-moto mécontents

Cette mesure rappelle curieusement une autre décision prise en début de ce mois toujours par le même la même autorité locale. Le 10 octobre, plus aucun transport en commun, en particulier les taxi-motos ne pouvaient circuler à partir de 18h30 jusqu’à 5heures du matin suite a la recrudescence de l’insécurité. «Nous devons prévenir des cas d’assassinat et de meurtres que nous sommes en train de vivre. Dans la plupart des cas d’insécurité, il y a une facilitation manifeste des motards. La facilitation des jets de grenades et du transport des assassins dans les quartiers où les véhicules ne circulent pas», avançait le maire de la ville.
Décision absurde pour certains habitants de Goma qui estiment que c’est pourtant grâce à ces taximen qu’ils pouvaient rentrer tard à leurs domiciles. D’autres se sentaient rassurer dans l’obscurité en voyant les lumières des motos. Pour les motards, c’est un manque à gagner que d’arrêter de circuler à peine la nuit tombée. La ville devient déserte et les clients rares.

Les filles de joie en colère

Pour les professionnels du sexe, cette mesure rend difficile l’exercice de leur métier. «On reste cloué à la maison sans rien faire alors que nous gagnions notre vie avec notre travail( la prostitution ndlr). Sans transport de nuit, nous craignons d’aller dans les boites de nuit à pieds car nous sommes tracassés maintenant par les forces de l’ordre déployées dans certains coins de la ville pour arrêté les motards qui vont au-delà de 18h30», déplore Jémima, dans la vingtaine et professionnelle du sexe. Pour exprimer leur mécontentement, les filles de joie menaceraient de descendre dans les rues de Goma si aucune solution n’est trouvée pour faciliter leurs conditions de travail. Les populations de Gisenyi au Rwanda et d’autres villes environnantes congolaises, dont certains vives d’un côté de la frontière et travaillent de l’autre côté voient leur quotidien perturbé par cette mesure.

Malgré cette fermeture de frontières, les relations diplomatiques entre la RD Congo et le Rwanda continuent malgré des pics de tensions à cause du soutien du Rwanda à la rébellion du M23. Leurs différentes ambassades restent ouvertes en dépit des condamnations du soutien rwandais aux mutins qui ont changé de nom. Le M23 s’appelle désormais Armée révolutionnaire du Congo (ARC).

Ley Uwera et Jacques Matand '